Vote sur le projet de loi de lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement.
L’Assemblée nationale vote aujourd’hui en première lecture le « projet de loi de lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement ». Les député-e-s du groupe écologiste ont décidé de voter majoritairement contre le texte après un débat en commission puis en séance mené par Sergio Coronado, chef de file sur le texte.
Les attentats que notre pays a subis en 2015 ont donné lieu à une frénésie législative en matière de lutte contre le terrorisme toujours sous un angle sécuritaire. Convaincu que l’état de droit n’est pas un obstacle à la défense du pays et que les besoins résident dans les moyens donnés à la police et à l’institution judiciaire.
Le projet de loi renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement est donc le cinquième texte sécuritaire en cinq ans. Ce texte vise à pérenniser des dispositions totalement dérogatoires au droit commun, et d’accélérer la marginalisation du juge judiciaire au bénéfice du procureur et du préfet.
C’est la raison pour laquelle après une première dénonciation générale par les barreaux français et les représentants de la magistrature, pour la première fois dans l’histoire de la justice en Europe, l’ensemble des barreaux européens, a dénoncé la dérive liberticide de la France. Inédit également, le communiqué du président de la Cour de cassation et des présidents des cours d’appel publié pour dénoncer « les mises en cause répétées » de la magistrature et « l’affaiblissement du rôle constitutionnel de l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle ».
Dans les faits, le texte retire des prérogatives au juge judiciaire pour les donner au procureur de la République quand bien même l’indépendance du parquet vis à vis du pouvoir politique fait débat.
Le gouvernement a ainsi confié au parquet certains pouvoirs d’investigation dévolus au juge d’instruction. En effet, dans le cadre des enquêtes, préliminaires ou de flagrances, le procureur de la République pourra ordonner des perquisitions de nuit, la captation de parole et la sonorisation de lieux d’habitation. En outre, la fouille des bagages et des véhicules pour une période de 12 heures pourra être décidée par le préfet.
Par ailleurs, ce projet de loi permettra d’assouplir l’utilisation des armes pour les forces de l’ordre allant au-delà de la légitime défense. Il offrira la possibilité de retenir quelqu’un pendant quatre heures après un contrôle d’identité sans l’intervention d’un avocat ainsi que l’assignation à résidence administrative pour les personnes de retour d’Irak ou de Syrie, mais encore une peine de « perpétuité dite incompressible » portant la période de sûreté jusqu’à 30 ans et des moyens de surveillance supplémentaire comme le recours aux Imsi-catchers et aux logiciels espions.
Pour autant, cette accumulation de réforme ne s’accompagne pas des moyens matériels et humains adéquats. Il s’agit en somme de mesures exceptionnelles entraînant une restriction des garanties des citoyens et un risque d’actions discrétionnaires des forces de sécurité, sans contrôle des institutions indépendantes. Sans que l’efficacité en matière de lutte contre le terrorisme ne soit jamais démontrée, comme si l’état de droit était un obstacle pour nous défendre. C’est pourquoi nous, députés écologistes avons décidé de voter contre.
Laurence ABEILLE, Brigitte ALLAIN , Isabelle ATTARD, Danielle AUROI, Michèle BONNETON, Sergio CORONADO, Cécile DUFLOT, Noël MAMERE, Jean-Louis ROUMEGAS, Eva SAS
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